Goûts musicaux efféminés. Devrais-je écouter des artistes un peu plus violents ?

Ma question du jour concernera l’épineux sujet des goûts musicaux.

Je ne sais pas si je vous l’ai déjà dit, mais pour moi, Francis Cabrel est le meilleur poète (français) que l'on ait connu depuis Molière et Ravel.

Je pleure comme une madeleine dès que j'écoute cet artiste, quel que soit l'album.

L'encre de tes yeux excite mes glandes lacrymales.

Réverbère me fait jaillir les larmes des globes oculaires.

La Cabane du Pêcheur me fait carrément fondre en sanglots.

Quant à la dernière (Chêne liège), je n'arrive pas à l'écouter jusqu'au bout tellement je chiale comme une fillette.

Alors que j’étais en train d’expliquer ces émotions à mes collègues ce matin à la pause-café, j'ai dû essuyer quelques railleries.

D'après Jean-François (le commercial bedonnant mais néanmoins sympathique du quatrième étage), un homme qui écoute Cabrel serait « au mieux une fiotte, au pire une tarlouze » (pour employer ses propres termes). Vous remarquerez au passage que Jean-François est un peu « brut de décoffrage » dans ses propos. Il faut dire que ce jeune cadre prometteur est natif de Ploërmel (56).

Toujours est-il que l'énumération des albums que j'ai récemment achetés à la FNAC (Jean-Jacques Goldman, Chimène Badi, Céline Dion, Linda Lemay) a donné à Jean-François l'occasion de débiter toute une litanie d'injures homophobes à mon encontre, lesquelles n’étaient pas sans rappeler les récentes allégations de mon père relatives à mes orientations sexuelles.

Je ne comprends pas l'étroitesse d'esprit de ce type de personnes. Si l’on est libre d’écouter et d’apprécier tel ou tel genre musical, je ne vois pas l’intérêt de désavouer systématiquement ce qu’apprécient les autres. Je pense qu’il est inconvenant d’associer une orientation sexuelle à un genre musical, et je préfère largement les personnes qui se donnent le mal de formuler des critiques constructives et basées sur une réflexion cohérente qui exclut tout jugement à l’emporte-pièce, comme je vais le faire par la suite.

Pour ce qui me concerne, sans prétendre vouloir assener des vérités universelles et sans volonté de dénigrement, je suis parfois stupéfait par les disques dont se gargarisent certaines personnes.

Tout à l'heure, je suis allé boire un apéritif anisé chez un autre de mes collègues que je connaissais assez peu, et qui écoute de la musique franchement inaudible. D'ailleurs, je pense que le mot « musique » ne sied pas forcément à ces « œuvres » dont il semble se délecter à longueur de soirées.

On y entend en effet de jeunes gens, très certainement consommateurs réguliers de substances stupéfiantes et/ou hallucinogènes, hurlant des textes et martyrisant leurs guitares pour en sortir des sons complètement chaotiques et dénués de tout sens mélodique. De mémoire, le groupe que mon collègue m'a fait écouter s'appelle Metallica et, d’après lui, ces individus feraient « un carton » auprès de la tranche d’âge quinze – vingt-cinq ans.

Je n'arrive pas à comprendre que l'on puisse aimer ce genre de choses, d'autant plus que les paroles sont hurlées, incompréhensibles et – de surcroît – chantées en anglais. Je ne vois pas l'intérêt d'écouter de la « musique » si l'on ne comprend pas ce que le chanteur déclame. De la même manière, la musique électronique est un non-sens, puisqu'il n'y a même pas de paroles.

Le pire, c'est que les individus qui écoutent ces « artistes » se permettent de critiquer ceux qui écoutent de la vraie musique, et ce manque d'ouverture d'esprit m'énerve vertement.

Néanmoins, les quolibets que j’essuie de manière récurrente lorsque j’évoque mes artistes préférés, me poussent à me poser un certain nombre de questions.

Faut-il forcément écouter de la musique violente (style Kyo ou Téléphone), pour être considéré comme un homme « qui en a dans le slibard » (pour paraphraser ce taquin de Jean-François) ? Pourrait-il exister un lien entre mes déceptions sentimentales et la musique que j'écoute ? Si tel était le cas, dois-je me mettre à écouter du métal, du ska ou du hip-hop ? Et si oui, auprès de quel groupe devrais-je m’initier pour commencer en douceur ?