Cruelle soirée pour mon ego. Les femmes sont-elles définitivement dépourvues de pitié ?

C'est le cœur lourd que je vous écris ce message. Si j'ai autant de vague à l'âme aujourd’hui, c'est que la plantureuse Sabrina s'est tout bonnement foutu de ma fiole (et je vous prie, une fois n’est pas coutume, de m’excuser pour la vulgarité de mes mots).

Je l'attendais sur les coups de vingt-deux heures (comme je vous l'ai expliqué précédemment), et à vingt-deux heures trente, je n'avais toujours pas vu l'ombre d'un bout de ses adorables seins, pour la bonne et simple raison qu’elle n’était pas arrivée chez moi.

Impatient et déçu, j'ai pris mon courage à deux mains, et j'ai appelé la retardataire, qui a prétexté une panne sur la ligne de métro pour excuser son retard. Elle m'a toutefois assuré qu'elle viendrait à pied, et a parfaitement compris ma réticence à aller la chercher en voiture, compte tenu du froid glacial qui risquait de me saisir au sortir de mon immeuble, et ma crainte de me rendre dans son quartier – dit « sensible » – où de jeunes personnes rôdent le soir avec des intentions certainement belliqueuses, notamment à l'égard d'un bellâtre comme moi qui arbore fièrement des signes ostentatoires de puissance financière.

Après avoir raccroché, je me suis fait une tisane, et je dois également vous avouer que je me suis masturbé en toute hâte, dans le but de multiplier les chances que notre partie de jambes en l'air dure assez longtemps pour envoyer la donzelle au septième ciel (il s’agit d’une technique quasi-infaillible dont je vous avais déjà fait part, si je m’en souviens bien).

Mais ce plaisir solitaire de courte durée (j'avais pour l'occasion, ressorti le catalogue de La Redoute) n'aura servi à rien, car, comme le dit Gilbert Bécaud dans un de ces célèbres morceaux : « j'ai attendu, attendu, elle n'est jamais venue ».

Pas de coup de fil confus, pas de courrier électronique pour me présenter ses légitimes excuses, et le pire, c'est qu'elle n'était pas à son poste de travail aujourd'hui, comme si elle ressentait une certaine honte à avoir éconduit un prétendant de mon rang, ce que je conçois naturellement.

En tout état de cause, je me dis que j'ai bien fait de ne pas rompre trop tôt avec Michèle, poussé que j'étais par mon enthousiasme d'honorer le mont de Vénus de Sabrina. Comme quoi, comme dit le proverbe, « un tiens vaut mieux que deux tu l'auras », et je vais donc de ce pas recontacter Michèle pour lui rappeler combien je l'Aime, et combien j'aurais envie de lui faire l'Amour (le « A » majuscule s'impose en pareilles circonstances, mais je suppose que la plupart d'entre vous n'ont jamais Aimé une femme aussi intensément que j'Aime ma Michèle).

Bien entendu, il est hors de question que j’évoque auprès d’elle mon rendez-vous raté avec cette petite pimbêche de Sabrina, car Michèle risquerait de douter de la sincérité de mes sentiments. Comme vous en avez certainement déjà fait le constat, les femmes sont des êtres très cyclothymiques et imprévisibles, prêtes à sauter sur la moindre occasion pour porter des jugements hâtifs et malvenus sur les hommes. Ainsi, des clichés à la peau dure circulent dans l’imaginaire collectif féminin, et l’on a vite fait d’être taxé de « salaud » voire de « gros connard » dès que l’on a le malheur de faire un faux pas, aussi bénin et insignifiant soit-il.

Je mentirai donc par omission à Michèle, en faisant entièrement l’impasse sur les révélations de mon attirance coupable envers la jeune Sabrina.

Reste un ultime problème, qui s’apparente plus à un futile détail : je dois laver l'affront que l'autre petite sotte a osé me faire, et je pense pour cela qu'il conviendrait de l'éliminer professionnellement. Ça, j'en fais mon affaire assez rapidement. Étant donné qu'elle est encore en période d'essai, et compte tenu de mon influence grandissante auprès de mon Directeur des Ressources Humaines (DRH), ça ne devrait pas être trop difficile.

Pour autant, une question me turlupine, suite à cette nouvelle déconvenue : qu'est-ce qui pousse le sexe faible à témoigner aussi peu de respect envers les hommes ? Pensez-vous que cela puisse avoir une origine génétique, étroitement liée à la présence d’un second chromosome X au sein de leur caryotype ?