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Le petit monde de Stephanus
9 septembre 2014

Dissolution d’un bout de tissu. Existe-t-il un acide suffisamment puissant pour une telle opération ?

Après ma visite de vendredi auprès de mes parents, j’ai accepté de rester manger un morceau avec ma mère et de passer la nuit à la maison.

Nous avons installé papa dans son lit et lui avons donné un clairon en lui conseillant de souffler dedans en cas de problème, puis nous sommes descendus dans la salle à manger, où nous attendait un plat à base de choux, de rutabagas, et de Valstar (que mon ami Jean-Claude a coutume d’appeler « la bière des stars »).

Après le repas, nous avons fait une partie de Scrabble que j’ai brillamment remportée grâce au mot « scrotum » placé sur une case « compte triple », qui m’a rapporté la bagatelle de trente points en sus des cinquante points de bonus pour un mot de sept lettres. Ma mère n’ayant toujours pas sommeil, il a fallu que nous entreprenions une partie de nain jaune, puis une bataille, un menteur, et pour finir, un Monopoly que maman a gagné, cette vieille peau ayant réussi à m’arnaquer en m’échangeant la rue Lafayette et la rue Lecourbe, contre la rue de la Paix et l’avenue de Breteuil, ce qui lui assurait la propriété de l’ensemble des terrains verts et bleus, et lui a permis d’y construire des hôtels qui ont fini par me ruiner.

C’est donc énervé par cette défaite que je suis monté me coucher dans ma chambre d’adolescent.

Je n’arrivais pas à me vautrer dans les bras de Morphée, me projetant dans l’avenir en imaginant le décès puis les obsèques de papa. Je me demandais notamment s’il était souhaitable, pour son dernier voyage, de l’habiller avec son uniforme de milicien qui avait le bon goût d’être à la fois noir et sobre, ou s’il fallait lui préférer sa tenue de supporter du Racing Club de Lens (62), qui serait certes plus joyeuse mais sans doute mal perçue par le prêtre qui viendrait lui prodiguer les derniers sacrements, et qui ne manquerait pas d’être surpris du port d’une perruque jaune et rouge par le défunt.

À ce sujet, papa avait-il fait part de ses exigences quant à la cérémonie, et était-il certain qu’il désirât un office religieux ? Dans l’affirmative, il n’était point sûr que la paroisse étudie favorablement la demande de la famille, compte tenu des liens houleux que mon père avait entretenus tout au long de sa vie avec les hommes d’Église. N’avait-il pas, il y a une dizaine d’années, poursuivi le curé de la commune, en le traitant de « grosse pédale en robe », et en lui conseillant d’aller « enfourner [son] crucifix dans tous les orifices de [sa] mère »  ?

Que la cérémonie se déroule dans la maison de Dieu ou dans un lieu païen, subsistait également un problème de taille : allait-on enfermer papa dans le cercueil avec son fauteuil roulant ? Si tel était le cas, je supposais qu’il serait nécessaire de commander un cercueil sur mesure auprès d’un ébéniste, mais quel serait le surcoût éventuel d’une telle opération, par rapport à un cercueil normal ? Ce surcoût serait-il pris en charge par la sécurité sociale ? Dans le cas contraire, la mutuelle des anciens combattants prendrait-elle le relais ?

Ces questions technico-financières se bousculaient dans mon crâne en m’empêchant de trouver le sommeil. Dans le même temps, la peluche de l’ours Colargol qui trônait sur le rebord de la fenêtre, et sur laquelle le jeu de la lune et des arbustes du jardin projetait des ombres inquiétantes, semblait vouloir m’attirer le mauvais œil

N’y tenant plus, j’ai fini par me lever pour rejoindre l’ancienne chambre de ma sœur, dans l’optique de m’endormir plus facilement. En me couchant sous ses draps, le doux parfum de mon aînée est monté à mes naseaux et l’odeur m’a profondément excité. Légèrement penaud, mais assumant néanmoins mon geste, je suis allé vers la commode, en ai extrait une des vieilles culottes portées jadis par Christine, puis me suis de nouveau installé dans le lit en me caressant la verge avec l’étoffe de coton, tandis que les posters de Michel Sardou et Véronique Sanson punaisés aux murs de la pièces donnaient l’impression de me toiser d’un air réprobateur.

J’ai joui en silence, étouffant mon râle de plaisir dans l’oreiller de satin duquel émanaient des effluves envoûtantes.

Après avoir essuyé le bout de mon sexe, j’ai considéré que cela faisait la deuxième fois, en l’espace de quelques semaines, que je me laissais aller à des actes quasi-incestueux.

Pour effacer toute trace de cette honteuse branlette, je me suis dirigé vers les water-closets afin d’y jeter la culotte ayant servi à éponger ma semence, mais après avoir tiré la chasse à plusieurs reprises, cette saloperie de morceau de tissu continuait à flotter au milieu de la cuvette. J’ai bien essayé de la faire partir dans la tuyauterie à l’aide du balai, mais je n’ai réussi qu’à maculer le sous-vêtement d’une épaisse couche de merde, tant l’ustensile avait été souillé par les selles de maman.

Afin de régler définitivement ce problème, où pourrais-je trouver un produit – si possible en vente libre – capable de dissoudre entièrement une petit culotte soixante pour cent coton et quarante pour cent acrylique ?

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Le petit monde de Stephanus
  • Stephanus, le chaînon manquant entre Guy des Cars et Chimène Badi. Stephanus, ça se lit comme un bon Marc Lévy. Stephanus, c'est bon comme du bon pain, c'est plus authentique qu'un film de Guillaume Canet, et plus parfumé que la foune de Nadine Morano.
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