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Le petit monde de Stephanus
28 janvier 2014

Repas avec mes propriétaires. Comment éviter cette épreuve qui s'annonce dangereuse ?

Il m’est arrivé une drôle d’aventure hier.

Alors que j’étais tranquillement chez moi à regarder un feuilleton que, par pudeur, je ne nommerai pas, la sonnette de ma porte d’entrée a retenti. Cette interruption intempestive de la quiétude baignant ma douce soirée m’a sérieusement marri, d’autant plus que l’épisode sur lequel j’étais concentré depuis une dizaine de minutes était particulièrement palpitant, l’immonde Frémont étant sur le point d’annoncer son homosexualité aux habitants du quartier du Mistral. Néanmoins, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, j’ai daigné me lever de mon fauteuil pour aller ouvrir la porte au visiteur tardif (que j’espérais secrètement être de sexe féminin).

J’ai eu la surprise de découvrir, sur le pas de la porte, mes propriétaires accompagnés d’une demoiselle âgée d’une trentaine d’années, et dont j’aurais pu dire – si j’avais été rustre – qu’elle n’était pas gâtée par la nature.

Surpris mais n’oubliant pas mon savoir-vivre, j’ai fait entrer toute cette petite troupe dans mon appartement, après leur avoir demandé de m’excuser pour les slips sales qui traînaient sur le tapis. Monsieur et Madame M. se sont assis dans le canapé, et m’ont présenté la jeune femme comme étant leur fille Chloé, ce que j’estimais être un prénom plutôt joli pour une créature aussi laide.

En parfait gentleman légèrement « suce-boules », j’ai offert l’apéritif à mes trois improbables convives, servant un pastis à Monsieur, un vermouth à Madame et un Orangina au boudin.

Je me suis à mon tour assis, puis nous avons entamé la discussion qui a beaucoup tourné autour de ma personne, mes propriétaires me posant moult questions sur mon acclimatation à cette belle ville du Mans (72).

Tandis que je répondais poliment à leur petit interrogatoire – que je jugeais pour autant indiscret – je ne cessais de scruter leur fille, qui ne ressemblait décidément à rien de ce que j’avais pu rencontrer par le passé. Bec de lièvre surmonté d’un épais duvet tirant sur le brun, yeux vides de toute émotion, cheveux longs et gras, sans compter une paire de seins tombant comme deux grosses aubergines trop mûres moulées par un pull en laine. Pour vous permettre de mieux imaginer le tableau, cela s’apparentait à un croisement – raté – entre un ornithorynque et un poney. Bien que gêné d’être assis en face de cette créature que Dieu avait visiblement créée un jour où il devait avoir forcé sur la bouteille de porto, sa présence me réconfortait, la vue d’un tel amoncellement d’imperfections me rappelant qu’il y a sur Terre des individus plus malheureux que moi.

Au bout d’une quinzaine de minutes, la discussion a pris un tournant encore plus intime, mes propriétaires commençant à me questionner sur ma vie sentimentale. Ne souhaitant pas leur mentir, et considérant que j’avais laissé traîner sur la table de vieux morceaux de Sopalin roulés en boule, dont mes hôtes pouvaient aisément soupçonner qu’ils étaient emplis de foutre séché, fruit de nombreuses séances masturbatoires, je leur ai répondu que je n’avais pas encore rencontré l’âme sœur mais que j’y travaillais ardemment.

Ils ont immédiatement rebondi sur mon aveu de célibat, en m’indiquant que Chloé était elle-même à la recherche de son futur mari, et qu’elle était donc « un cul à prendre » (pour employer les propres termes de Monsieur M., dont le verbe n’est pas sans rappeler la truculence de mon père).

Là-dessus, ils m’ont demandé si j’accepterais de venir dîner chez eux dans le courant du mois de février. Ne souhaitant pas les froisser, et ayant dans l’idée de négocier éventuellement une réduction du montant de mon loyer, j’ai répondu positivement à l’invitation.

Suite à quoi, ils ont pris congé en me remerciant pour l’accueil chaleureux. Lorsque j’ai voulu serrer la main à l’ornithorynque-poney, celle-ci m’a tendu la joue en me disant que nous pouvions nous faire la bise, maintenant que nous étions « intimes ». Cette réflexion m’a beaucoup troublé, mais je me suis exécuté, en visant de mes lèvres une zone de son visage qui ne comportait pas de poils, ce qui fut assez ardu.

Une fois qu’ils eurent quitté mon appartement, je me suis rendu compte de l’erreur que j’avais commise en acceptant ce repas, et j’ai commencé à voir clair dans le jeu de mes propriétaires. J’ai la désagréable impression qu’ils souhaitent marier leur fille, et qu’ils ont vu en moi la cible idéale pour arriver à leurs fins.

Du coup, je me questionne sur l’opportunité de me rendre à ce dîner, car j’ai bien peur qu’ils me forcent à copuler avec leur immonde descendance. Je crains – une fois de plus – de me fourrer dans un drôle de pétrin (le terme « pétrin » désignant en l’occurrence l’entrecuisse de la donzelle, que j’imagine peu ragoûtant et très odoriférant. Et ne cherchez pas dans votre Petit Robert, le mot existe bel et bien, bande d’ignares !).

Ma question sera donc simple, succincte et directe : quelle excuse invoquer pour échapper à ce dîner qui risque de s’apparenter à un viol en réunion ?

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Le petit monde de Stephanus
  • Stephanus, le chaînon manquant entre Guy des Cars et Chimène Badi. Stephanus, ça se lit comme un bon Marc Lévy. Stephanus, c'est bon comme du bon pain, c'est plus authentique qu'un film de Guillaume Canet, et plus parfumé que la foune de Nadine Morano.
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